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Cession d’entreprise : Anne, ne vois-tu rien venir ?

La cession d’entreprise est un projet sensible et très personnel. C’est une vente pour laquelle très peu de dirigeants de PME ont de l’expérience. Même si vous êtes un bon commercial, vous ne vendez ni ici votre production, ni vos services. Cela revient à vendre la maison familiale parfois héritée depuis des générations, mais avec beaucoup plus de paramètres, de risques et des employés ! Mais après tout, ce sont des questions très proches.

Cession d’entreprise familiale, la belle affaire !

La cession d’entreprise de type familiale a été un sujet de discussion entre Aurélie et moi récemment. Sa mère, Anne, dirigeante d’une entreprise d’édition voulait vendre son entreprise, la retraite approchant. Mais c’était surtout la fatigue et la tension du métier qui la poussait à vendre, le marché avait muté. Elle l’avait fondée il y a 30 ans et la dirigeait avec son mari. Aurélie ne souhaitait pas reprendre l’entreprise, car elle voulait, comme ses parents l’avaient fait, ne pas « être seule », et avoir un alter ego à ses côtés, un proche. Elle était commerciale, elle aurait voulu avoir un gestionnaire pour allié. Elle resterait donc au Codir au sein de l’entreprise.

Faire une donation aux enfants, la réponse ?

Anne ne voulait pas non plus faire une transmission par donation totale. Elle voulait retirer les fruits de son travail, profiter, réaliser ses projets plus personnels. La cession d’entreprise au sein de la famille est toute une organisation. Ici, Aurélie était fille unique, une complexité en moins. Mais tout de même de vraies questions et le piège de la fiscalité : Pacte Dutreil, démembrement pour transmettre la nue-propriété de l’entreprise et conserver l’usufruit, société civile immobilière pour les locaux, donation partielle, qui reste dans l’entreprise, actionnaire minoritaire ou simple salarié ?

Anne était très liée à son entreprise. Elle possédait les murs et le fonds de commerce, elle disposait d’avantages liées à la fonction. Elle préférait louer ses locaux aux repreneurs, et les vendre plus tard pour garder un œil sur l’activité et conserver une sécurité de revenus.

> Il est nécessaire de passer en revue tous les liens avec sa société et de planifier l’après.

Ne pas se décourager après un premier échec de cession.

Pour Anne, le planning était fait : elle se donnerait un an pour sa cession d’entreprise. Après une première tentative de cession auprès d’un repreneur individuel extérieur à l’entreprise, c’est un revers. Le repreneur ne voulait pas faire évoluer les produits d’éditions comme elle l’aurait voulu. Et il s’est retiré rapidement. Se présente alors l’option de vendre la maison d’édition à deux anciens collaborateurs, brillants dans leurs domaines, mais non formés à la direction d’entreprise.

Que faire ? Elle a opté pour une cession avec un accompagnement à la transition sur deux ans. Heureusement, l’équipe a suivi, et Aurélie, le manager des ventes a pu aussi épauler les nouveaux dirigeants dans leur développement.

Une cession d'entreprise c'est un peu comme une rupture

Se préparer à la rupture, c’est mieux.

Ici, Anne était heureuse de ne plus aller tous les jours dans son entreprise, mais seulement de conseiller plusieurs fois par mois les repreneurs. Elle était rassurée car sa fille faisait une « formation permanente » aux nouveaux dirigeants. La « processus » de cession s’est bien déroulée. L’un des enjeux était de s’assurer que l’organisation ne dépende pas que de la dirigeante, et puisse perdurer et croître après elle.

> Le fait que Anne se soit bien préparée pour gérer son après a joué aussi. Elle ne voulait plus avoir la responsabilité de dirigeante, et voulait avoir du temps pour sa famille, agrandir la maison de vacances familiale.

Résultat : point de vide abyssal pour elle et de nombreux cookies aux goûters de ses petits enfants !

Le cas de Laurent rappelle celui d’Anne..

La situation de Laurent que j’ai accompagné était assez similaire à celle d’Anne. Nous avions établi que la transmission familiale n’était pas souhaitée et souhaitable, même si l’aînée de la famille était à l’origine de la création de l’entreprise. Etre patron de PME est un choix personnel profond.

> Dès lors, pour quoi et pourquoi un acquéreur trouvera-t-il un intérêt stratégique à reprendre vos années de passion et d’énergie mises dans votre histoire et votre patrimoine professionnels ? C’est la question primordiale à laquelle il faut répondre pour bâtir une véritable stratégie de cession pour laquelle vous optimiserez la valeur de convoitise.

Souvent, l’ancien dirigeant propose d’accompagner la transition durant une année voire 2 ans comme Anne. C’est rarement une bonne solution et plus un argument pour sécuriser le passage de témoin, une contrepartie dans la négociation.

> Gros inconvénient : le cédant maintien son empreinte sur l’entreprise alors que le successeur doit prendre le leadership et son indépendance rapidement.

Quant au délai, le plus important est d’être au clair sur l’énergie que vous êtes prêt à maintenir pour rendre votre « fille » attractive. J’ai été témoin de dirigeant qui se sont désengagés et ont dégradé le potentiel de leur PME.

> Résultat, sa vente devient plus difficile et longue à conclure, et sa valeur chute rapidement.

A l’inverse, avec Laurent, déjà acteur majeur de son marché, nous avons initié une diversification démontrant les potentiels à de futurs acquéreurs ciblés.

> Résultat, une vente de 2,5 fois le CA. Une très belle sortie familiale.

Pour conclure :

Créer et faire durer son entreprise est déjà un parcours complexe, alors « se préparer » à la cession d’entreprise, c’est résoudre un paradoxe :

le cédant vend son passé et le repreneur achète son avenir.

Au fond, si une bonne stratégie doit tenir compte des finalités personnelles de son dirigeant actionnaire, ce n’est pas différent dans le cas d’une cession : la finalité est la transmission familiale ou la cession à un tiers, où un certain nombre de conditions sont à remplir. Un plan stratégique est nécessaire à une sortie réussie et une pérennité de son œuvre.

NB : Ne pas oublier dans le cas d’une cession de société ou de fonds de commerce, l’information préalable des salariés ! Sinon gare à la faute (Article L. 23-10-1 du code du commerce – Modifié par LOI n°2015-990 du 6 août 2015 – art. 204)

Relisez notre article sur Comment choisir son associé, ce qui concerne aussi la cession future !